Alm'as Alkath — Cité Royale Gerudo

Sous le soleil de plomb, l'or qui décore leurs lances scintille de milles et un reflets. Derrière ses hauts murs de pierre, le joyau du désert rayonne tout autant : bâti tout autour d'une imposante oasis qui irrigue la Cité, il fourmille d'une vie qui semble avoir quitté les dunes depuis des décennies. De jour comme de nuit, les venelles et les sillons qui creusent les artères de la Medina pulsent avec plus d'entrain que partout ailleurs. C'est le cœur même d'un monde fait de sable, de vent et – pour quiconque n'a pas l’œil éduqué – de vide.

Passées les lourdes arches taillées à même la roche sommeillent deux sculptures antiques, dont l'une a perdu la tête. L'autre affiche un visage de femme, juché sur le corps d'une lionne. Son regard sévère tance sans compassion celles qui franchissent les portes gardées par les guerrières.

À l'ombre des enceintes de calcaire ocre, le vent ne charrie pas de poussière : il porte avec lui les senteurs de l'Ouest et tant d'autres parfums tout droit issus des confins du monde connu. Il drague aussi d'autres effluves, parfois plus agressives. Le commerce, dans la Cité-Diamant ne se limite pas aux épices et aux fruits. On y échange aussi le cuir comme les bêtes, certaines voyageant à deux pattes. Sans compter, évidemment, le fer ! Indispensable pour habiller l'étoffe comme pour alourdir la hanche, les armes et les bijoux sont monnaie courante sur les étals improvisés par les marchandes Gerudos.

Sotte serait celle qui réduirait Alm'as Alkath à son seul marché. Si l'ancienne Cité royale Gerudo constitue indéniablement un relais où s'abreuver après des jours à braver le désert pour quiconque peut y entrer, les ruines de la vieille ville représentent avant toute chose une sécurité autrement hors d'atteinte. Cachée derrière les lourdes pierres de sable, le ricanement des hyènes perd de son mordant. Plus que les piques portées par les filles du Colosse, ce sont bien les murs qui garantissent la protection dont jouit Riju et son clan.

C'est au centre de la Cité que demeure la Reine Rouge, celle dont la tribu a survécu au Fléau autant qu'au courroux du soleil. Couronnée à l'aube de ses seize ans, la jeune femme dirige la ville d'une main ferme et ne supporte que peu la contradiction — à l'image de sa mère avant elle, en somme. Elle réside depuis dans l'ancien Palais, aménagé il y a des siècles de cela pour les plus illustres des Λatifa.

Protégée par plusieurs gardes et quelques vigies, la demeure exalte un sentiment de pouvoir autant que de richesse. La longue allée d'orangers qui mène jusqu'aux premières marches relie l'ouillère principale, où bat le cœur de la ville, quoiqu'elles soient séparées par une imposante barbacane à grille d'acier. Plus loin, les arbres cèdent la place à des statues de pierre fine, qui viennent parfois habiller une fontaine alimentée par la palmeraie qui arrose tout le domaine.

Construite toute en courbes, la maisonnée des Reines est surplombée par un important pic-rocheux, source de toute l'eau de la Cité. Il traverse l'intégralité du palais et abreuve la salle du trône, qui repose sur un linceul aquatique pourtant si rare en ces lieux désolés.

A quelques pas du sérail, à peine, les Λatifa des temps anciens ont fait construire de vieilles baraques, ainsi que des écuries à chameau et à morse des sables. Ces dernières sont désormais réservées aux deux montures de Makeela Riju, ainsi qu'à ses guerrières les plus décorées, lesquelles s'entraînent à quelques coudées d'elles seulement.

Plus loin, passé le Grand Souk où tout s'échange et se monnaie, demeure le quartier des artisanes. Les Gerudos y travaillent le cuir, taillent la pierre et forgent l'acier. C'est là aussi qu'elles dressent les quelques animaux que crache le Désert et qui ne leur sont pas foncièrement hostiles. Entre les étalons et autres bovins des steppes sommeille le vestige d'une imposante statue de la Mère, qui tient autant de la Déesse des ergs que de celle jadis vénérée par les Hyliens.

À quelques pieds de toute cette agitation, les plus fatiguées trouvent le temps de se reposer et de se détendre dans l'un des établissements pensés à cet effet : comme leurs mères avant elles, les Gerudos de Riju accordent une importance primordiale à l'hygiène et ont donc aménagés deux thermes publics, qui comptent tous un hammam traditionnel. On y pratique aussi le massage et divers soins pour le corps, moyennant paiement. A quelques coudées, d'autres comptoirs proposent une autre forme de bien-être. Réservés aux seules femmes qui ont déjà saigné, de tels commerces offrent, dit-on, de bien étranges substances. Ainsi qu'un regard nouveau – sinon trouble – sur le monde...