Antique Province d'Akkala

Hostile et inchangée, la province de l’éternel automne comporte certains des paysages les plus sauvages de l'ancien Hyrule. Engoncée entre les Dents-de-Pierre qui déchirent Lanelle et les hautes montagnes d’Ordinn, Akkala paraît difficile à gagner. Elle prête le flanc est à la Mer du Nord, l’une des plus froide du monde connu, qui vient se briser sur ses falaises. Les marins et les Zoras qui pêchent à proximité de ses côtes sont généralement plus bourrus que les autres : la bruine et le gel creusent sur leurs visages des sillons semblables à nuls autres. A force de lutter contre le courant qui cherche à les broyer contre les Fjords, ils ont la gueule rongée par le sel et le vent, façonnée par l’angoisse.

Mais ces gens-là se font rares. À l’image des Territoires Gerudo, avec lesquels elle ne partage pourtant que peu de points communs, Akkala est une région dépeuplée. Sur ses vastes plaines et ses collines, quelques structures abandonnées s’acharnent à brosser une histoire pourtant délavée par les siècles, oubliée du temps lui-même. Certaines d’entre elles – comme le Fort du Nord,  que le noroît gelé n’a pas encore jeté à bas – sont désormais occupées par les tribus Boko qui pullulent dans les environs. La plupart, cependant, ressemblent davantage à des ruines et des débris d’un autre âge.

Les Cerbères mécaniques Sheikah qui parcourent inlassablement les profondeurs d’Akkala constituent, sans doute, l’une des raisons de cette désertion. Les araignées de fer y sont si nombreuses que certains pourraient se penser pris au piège, en plein cœur de l’ancienne Tenure royale. D'aucuns, dont il est sûrement raisonnable de douter de la fiabilité, prétendent même en avoir vu déloger les nuages.

Mais les monstres de rouages et d'acier ne peuvent expliquer, à eux seuls, cet inexorable exode. Les vieilles masures isolées, rongées par le lierre et polies par la pluie ne laissent que peu de place au doute : avant même le Fléau, les crêtes étaient déjà délaissées. Qui sait depuis combien de temps le vieux phare sommeille, seul face aux vagues, au ressac et au crachin froid d'un océan avare, ingrat et cruel ? Peut-être d'autres secrets hantent-ils encore les buttes et les tertres qui vallonnent le territoire.

Au cœur même d'Akkala, près des ruines de l'ancienne garnison d'Hyrule, s'étendent d'immenses tourbières, partiellement asséchées. Elles creusent un ravin profond, duquel émerge un pilier de pierre blanc, fade et semblable à un os. Cette forme et cette texture si étranges lui ont valu l'angoisse des quelques-uns qui ne sont partis. Ils l'appellent le Pic de Moro, en référence à l'antique Louve, qui gardait les montagnes. Si – pour certains – il lui vouent encore un culte assidu, nul n'oserait approcher son domaine, de peur de provoquer son courroux.

Face à ce craintif dédain, la nature reprend depuis des siècles ce qui de droit lui revient. À la nuit tombée, renards et loups hurlent parfois, la gueule pointée vers la lune. Souvent, ils prennent en chasse les moutons, les cerfs et les vaches qui paissent dans les vallées. Près des flots, les goélands, les mouettes et les macareux suivent de près les nacelles des chalutiers. Le long des récifs se cachent parfois phoques et serpents. On prétend d'ailleurs que lorsque ces derniers s’entrelacent, c'est signe de chance.

Reclus à l'extrême nord du vieux continent vit un homme, dont les natifs parlent tantôt avec révérence, tantôt avec morgue, mais toujours avec appréhension. Le vieillard, caché derrières les hautes pierres d'un vieux fanal, est parfois décrit comme un esprit mauvais qui occuperait les lieux et prendrait l'apparence d'un vieux Sheikah. L'entité – si toutefois il ne s'agit pas simplement d'un humain particulièrement âgé – perdure hiver après hiver, depuis si longtemps que d'aucuns le disent plus ancien que le Fléau.