Plateau du Prélude

En des temps anciens, qui précèdent le Fléau de plusieurs siècles, au bas mot, les clameurs de la foule retentissaient en ces lieux aujourd’hui abandonnés. Oublié de toutes et tous le Plateau du Prélude domine l’ensemble des plaines de l’ancien Royaume. Nul ne saurait dire pour sûr jusqu’où se dressent les larges colonnes de pierre taillée qui renforcent sa structure, car une brume étrange étrangle ses sommets.

Les quelques uns qui parviendraient néanmoins à mener l’ascension auraient pourtant beaucoup à découvrir : on dit que les vestiges d’une époque grandiose, hors du temps, habillent encore les sols de cet insurmontable îlot. La vieille nef ravagée qu’il abrite fut, jadis, l’une des plus importantes reliques de l’antique Hyrule. D’aucuns prétendaient déjà, en d’autres âges, que la charpente et l’ossature qui le soutiennent n’ont rien perdu de leur âme. La mémoire de la roche continue à faire vivre cette cité morte.

Car c’est bien là le secret que les Hyliens semblent avoir effacés de leurs souvenirs : sur le Plateau du Prélude, ils bâtirent jadis une autre capitale Royale, elle aussi nommée Ylia. Avant d’être ravagée, maintes générations avant la catastrophe, elle fut même là première.

En dehors de la Cathédrale, qui continue à défier le lierre, la pluie et le vent, les quelques restes de l'ancienne Ville-Close furent laissés à l’abandon. Il ne demeure rien du Palais des Rois où certaines souveraines avaient pris l’habitude, dit-on, de recevoir de bien étranges vagabonds.

Seul le vieux Sacerdoce fut entretenu, par une troupe de moines qui en fit son lieu de pénitence. Partout ailleurs, la nature reprit ses droits, éventrant les maisons et jetant à bas les remparts, mais à force de sueur et de foi, le Cloître a survécu. Certains bas-reliefs et quelques antiques estampes Sheikah laissent à penser que c’est en ces lieux que se faisaient couronner les Suzerains d’Hyrule.

Comme le reste du Royaume, le Plateau fut pris d'assaut par des dizaines d'araignées mécaniques, dont les carcasses charbonnent l'horizon. Certaines armatures tapissent les ruines du temple de l'Est tandis que les autres jonchent les marches du Temple du Temps, son parvis et même pour l'un d'entre eux, sa toiture percée par les saisons et l'éternité. De leurs pattes noircies par la rouille émerge pourtant une verdure timide, certes, mais de celles qui annoncent le retour de la vie.

Des cimes du Mont Hylia au ramage des grands arbres du bois des esprits, le Grand-Plateau grouille aujourd'hui d'une certaine sève, sereine et innocente. Pourtant, ce fut l'un des derniers bastions impériaux à sombrer face aux coups de boutoir du Seigneur-Sanglier. Pour qui sait observer, les traces de la bataille sont d'ailleurs évidentes : quoique cachées dans les hautes-herbes, près des anciens pieds de culture, l’empennage rougi de certaines flèches se détache. L'acier, tombé des mains soldats, s'ankylose dans la boue. Près de la vie souffle l'odeur délétère de la mort.

Nul ne saurait dire qui a érigé la stèle, sur la plus haute crête de ce berceau de la civilisation Hylienne. Elle n'est jamais mentionnée dans les rares récits qui sont parvenus jusqu'au nouveau-monde et ne figure sur aucune iconographie. Elle ne porte pas non plus la marque du peuple de l'Ombre, dont le passage en ces lieux saints à pourtant laissé plus d'un stigmate...