Posté le 15/08/2020 15:19
Les heures crépusculaires du matin et du soir étaient celles que Slo'Anh préférait dans sa nouvelle vie terrestre. Les changements de température étaient tels que l'humidité grimpait dans l'air, rendant celui-ci plus respirable, moins irritant pour la Zora qui avait pris l'habitude d'être immergée le plus clair de son temps. Ses recherches ne l'avaient pas vraiment avancée sur sa question initiale, mais au moins pouvait-elle être fière de connaître ce phénomène météorologique, désormais. « De quoi aller loin… » marmonna-t-elle, un peu fâchée contre elle-même.
Un homme croisa son regard, les sourcils arqués, une expression de surprise sur son visage de Sheikah. L’Hylienne qui lui tenait le bras se cacha légèrement derrière elle, peu rassurée. « Pardon, je parlais seule. » précisa-t-elle, l’expression d’une neutralité bien travaillée. A son arrivée au village, la chasseuse aurait sans doute tenté de sourire pour avoir l’air plus avenant, mais quelques déconvenues lui ont montré que plus les humains voyaient ses dents, et moins ils se sentaient en confiance. Sans que ça ne devienne une habitude, la femme-poisson avait déjà été objet de convoitise chez certains de ses congénères, aussi paraître si monstrueuse lui avait couté, au début. Mais auprès des siens, c’était son esprit renfermé qui l’éloignait d’autrui. Elle avait donc, une nouvelle fois, appris à faire avec.
Pourtant, ce matin-là, Slo’Anh avait vraiment toutes les peines à se motiver pour la journée qui l’attendait. Elle se sentait stagner dans ses découvertes, mais la perspective d’affronter le domaine Zora maintenant qu’elle cohabitait avec leurs ennemis tacites ne l’enchantait guère. Aussi repoussait-elle l’échéance, encore et encore. Elle aurait aimé que son frère la prenne dans ses bras et lui dise que tout se passerait pour le mieux. Mais Chev’Anh n’était pas là.
Secouant la tête pour chasser toutes ces mauvaises pensées, elle s’assit sur un petit tas de pierre qui longeait le chemin menant chez l’apothicaire. Aucune lumière n’était encore allumée, ainsi lui restait-il un peu de temps libre avant de regagner la bâtisse. Elle en profita pour sortir quelques instruments dont elle oubliait toujours le nom que lui avait prêté son mentor. Elle les avait nettoyés la veille, mais profita de cet instant pour les affuter.
Absorbée par sa tâche, elle leva néanmoins les yeux, pour rendre sa vision un peu plus nette. Un vieillard – pourtant nettement plus jeune qu’elle en termes d’années – fumait la pipe dans un jardin en face d’elle. Malgré elle, elle fut fascinée par les volutes de fumée qui s’en échappaient. Puis, se reprenant, elle regarda la vie qui commençait à se manifester dans le village. Des hommes, des femmes, des enfants qu’elle parvenait de mieux en mieux à différencier, voire à reconnaître.
Son regard se fixa sur une personne aux cheveux longs et au regard clair. Il lui semblait l’avoir déjà vue, cette personne, mais elle n’en était pas certaine. Sous certains aspects, ce qui semblait être un homme lui rappelait ce sale gosse rencontré au bord de l’eau quelques temps auparavant. Mais sa stature n’avait pas l’air d’être la même. Ni ses traits, d’ailleurs, maintenant qu’il lui faisait face.
Le regard de l’étranger croisa celui de la Zora, qui, prise au dépourvu voulut regarder ailleurs. Mais ses instincts reprirent le dessus. Même si la situation n’était pas dangereuse, ces fichues interactions avec les autres rendaient Slo’Anh nerveuse. Et son père lui avait appris à ne pas quitter le danger des yeux. Elle plongea donc ses deux grands yeux jaunes dans ceux de l’Hylien, tout en continuant à aiguiser ses outils pour se donner une sorte de contenance.