Le Fléau d'Elimith : des maux que nul rempart ne saurait repousser - Retour au puits

[Quête Halloween - 2020] - Partie III - Team Doctor Quinn & Doctor House]

Fin de l'automne - 4 mois 1 jour après (voir la timeline)

Slo'Anh

Sourire d'enfer

Inventaire

(vide)

Habituée à la vie dans une famille nombreuse, Slo’Anh n’avait cessé d’imaginer les retrouvailles de leur petit groupe d’enquêteurs, dont la majorité n’était même pas originaire du village qu’ils essayaient de sauver. Pourtant, cette entrevue au bord de la rivière lui laissait un goût amer à l’arrière de la gorge. La confiance entre chacun était particulièrement fragile, et s’ils ne pouvaient pas compter les uns sur les autres, un esprit malin s’imiscerait forcément dans ces lignes de faille.

Après avoir mis les choses à plat, ils avaient aussitôt choisi de se séparer de nouveau. Bien entendu, la Zora comprenait pourquoi : le temps leur était compté. Elle espérait que Ludrick tiendrait le coup de son côté, et s’en voulait de l’avoir laissé, même si chacun avait sa mission bien précise à accomplir. Un peu plus loin, bien ensevelie dans son inconscient, une inquiétude existait aussi pour Zelda - elle frissonna en prononçant ce prénom dans sa tête - et Arkaï. Eux aussi avaient dû se sentir brusqués par les relations déjà existantes dans la vie d’Elimith. Elle soupira et tâcha de se concentrer sur ce qu’elle avait à faire, mais tout ceci avait fait naître une sensation désagréable au creux de son ventre, et qui ne cessait de croître à mesure qu’elle et Célyse approchaient du puits où Ludrick avait été blessé.

En ce qui la concernait, le choix n’avait pas été compliqué, car elle était de loin la meilleure nageuse. Elle avait néanmoins été tant surprise que reconnaissante quand Célyse avait proposé de l’accompagner. Au moins, si quelque-chose devait lui arriver, quelqu’un en serait le témoin, et elle ne pourrirait pas là-dessous dans l’ignorance la plus totale. Forte de cet élan d’optimisme, elle jeta un regard à sa compagne d’infortune. Les deux n’avaient échangé que très peu de mots, aussi peu bavardes l’une que l’autre. Pourtant, l’Hylienne savait poser les questions justes, et la Chasseresse s’en voulait un peu de priver le reste de la compagnie de son éloquence.

« Je crois que c’est là. » marmona-t-elle alors qu’elles arrivaient près du fameux puits. L’endroit était des plus classiques pour un village de la sorte, mais tout ce qu’elles avaient entendu à son sujet ne faisait que le rendre plus sinistre. La Zora posa ses grandes mains sur le rebord et se pencha pour jauger la profondeur. Un vertige dont elle n’avait jamais souffert lui secoua l’échine. Bon sang, quelle petite nature elle faisait ! Elle avait vu bien des créatures à la gueule bien moins amène pendant ses parties de chasse au large. Pourquoi se mettait-elle dans ces états ridicules ? Un grognement sourd s’échappa de sa gorge alors qu’elle pestait intérieurement contre elle-même. Elle lança immédiatement un regard désolé à Célyse. « Ça va ? » lui demanda-t-elle, désireuse de voir ses sentiments partagés, ou bien de se heurter à un courage plus évident que le sien, qui l’inspirerait peut-être. 

« D’habitude, je plonge sans réfléchir. » expliqua-t-elle. Mais ne sachant pas vraiment quelle profondeur l’attendait au fond, ni quel habitant occulte, elle préféra s’abstenir. Ludrick les avait averties que la corde que Soje leur avait fournie était trop courte pour atteindre la surface de l’eau en contrebas. La Zora ferma les yeux et se concentra pour ressentir son élément qui l’appelait, tout en bas. Elle joignit le geste à l’exercice en laissant tomber une petite pierre qui sombra de longues secondes avant de leur offrir son plouf le plus mélodieux, légèrement étouffé, mais avec un écho témoignant de la grandeur de la chambre. C’était profond, assurément. Si elle avait le temps d’aller au fond, et de nager très vite vers la surface, elle saurait sans doute atteindre la corde, plus haut, mais sans certitude. Il fallait pourtant se dépêcher.

« Je te décrirai ce que je vois quand je ne serai pas sous l’eau. » Elle hésita encore un instant, un peu convaincue tout de même que le fait qu’elle ne soit pas humaine pourrait lui donner un avantage pour ne pas subir le même sort que Ludrick. Personne ne toucherait à la moindre de ses dents qui étaient sa fierté. « Si je dois me battre, ne prends pas de risques inconsidérés. La priorité, c’est le village. » conclut-elle d’un air sérieux. Elle ne tenait pas vraiment à mourir, mais encore moins à emporter quelqu’un avec elle.

Puis, ne se laissant pas le temps de paniquer, elle descendit maladroitement le long de la corde qu’elles avaient pris le temps d’attacher solidement auparavant. Du moins l’espérait-elle, après avoir observé beaucoup de nœuds dans sa vie, mais sans avoir réellement eu le loisir de les reproduire en dehors de ceux de leurs filets de pêche. A mesure qu’elle descendait, ses yeux se fermaient obstinément. Arriva enfin le bout de la corde, et comme elle s’y attendait, la surface était encore bien loin. La lumière de son leurre frontal vibrait timidement, en rythme avec ses propres tremblements. Elle se sentait comme prise dans une étreinte assez légère pour ne pas être sentie, mais qu’elle toucherait au moindre mouvement, et cela la terrifiait. Réalité ou imagination, elle n’aurait su le dire, jusqu’au moment où ses mains lâchèrent la corde.

A son tour, elle offrit à Célyse son plus beau plouf, avant d’ouvrir grand les yeux, lanterne allumée aussi fort qu’elle le pouvait, et prête à esquiver au moindre assaut.