Arkaï Validé


Arkaï

18 ans

Gerudo

Homme

Ambre


Arkaï a été formé au monastère secret des Sheikahs, non comme un artisan des ombres ou un messager de la nuit, mais à la manière des anciens guerriers. Il a appris à prendre des coups, comment en donner, et pourquoi le faire. Il sait manier plusieurs types de lames, tirer à l'arc et peut endurer des conditions extrêmes. Plusieurs écoles de sabre n'ont plus de secrets pour lui mais il préfère largement celle du Lion, centrée sur l'assaut et l'endurance.

Mais en dessous du bretteur entraîné, se trouve encore un enfant sauvage, livré longtemps à lui-même, et qui a dû apprendre à survivre. A cause de cela, le respect des règles n'ira jamais jusqu'à la mort pour Arkaï. Entre la mort ou un jour de plus à vivre, il choisira toujours de voir à nouveau le soleil se coucher, même dans le déshonneur.


La nature est généreuse avec les Gerudos. Elle les dotent de bras forts, d'épaules solides, de jambes immenses, et à cet égard, Arkaï ne fait pas exception.
A peine adulte, il dépasse largement la plupart des hyliens, qui lui arrivent généralement au menton.
Chez les Sheikahs, il se distingue par sa peau brune, son regard d'ambre et ses longs cheveux d'un roux aussi vifs que l'automne.
Chez les Gerudos, il n'existe pas, car il est un homme, sans qu'un doute soit permis.
Dans la nature, il est à son aise ; des années à survivre puis à être entraîné l'ont forgé. A mesure que le temps passe, la fine silhouette prend de l'épaisseur si bien que le garçon athlétique pourrait laisser place à un colosse, d'ici peu.


On ne perce pas aisément le silence de ces yeux de fauve ni le calme dont ils font preuve en permanence.
Arkaï est à la croisée des chemins : l'enfant n'est pas encore mort en lui, mais l'adulte a déjà vu la lumière du jour. De ce fait, il lui reste beaucoup à apprendre, mais il a déjà vécu bien plus que beaucoup d'autres.
En public, il porte un masque sculpté par les épreuves ; lisse et discret, qu'il ne retire que rarement. Il en tire une certaine fierté, qui s'ajoute à son orgueil filial : Né noble, il se sent naturellement porté par un plus grand destin que son prochain, et il s'efforce d'être à la hauteur de son rang, notamment lorsqu'il prend la parole.
Mais au fond, Arkaï est poursuivit par des questions brûlantes, auxquelles il cherche ardemment des réponses qui apaiseront son âme.


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Première leçon
Oser l'inacceptable
« Relève toi. Recommence. »

Arkaï passa la paume de sa main sur sa lèvre fendue, constatant qu'elle saignait abondamment. Il pouvait déjà sentir le goût du sang envahir sa bouche, et se mêler à la bile de l'humiliation. Répondant à sa douleur par un grognement rauque, il planta le sabre de bois dans la terre boueuse et se redressa de tout son haut.

Le maître Shingen n'avait pas bougé d'un pouce. Il affichait le même calme, la même sérénité imperturbable, comme s'il avait posé un masque de cire sur son visage. Le garçon s'y était fait ; cela lui rendait la défaite plus facile qu'une morgue moqueuse et arrogante. Là où ses camarades prenaient un malin plaisir à l'envoyer au tapis, son professeur n'avait jamais cédé à ce genre de jeu pervers. Ca ne l'empêchait pas de le rosser à répétition, plusieurs fois par jour depuis plusieurs mois. 

« Cesse donc de jouer, attaque moi. »

L'élève sut qu'il n'avait que trop traîné, alors il agit vite. Un pied en avant, dirigé vers l'ennemi. L'autre en arrière, en barrage. Arkaï expira un grand coup et se projeta à nouveau vers le maître, sabre tendu, avec comme idée de barrer brusquement à gauche, sur la jambe la plus faible de sa cible, et de porter l'estocade derrière la garde, sur la cheville. L'espace d'un instant, il crut avoir pris de vitesse son aîné, qui tardait à changer de posture, mais son pied d'appui fut fauché net par le sabre de bois de celui ci. Après un trop long flottement dans l'air, où Arkaï vit lentement le sol lui arriver en pleine face, il acheva sa course le nez dans la boue.

« Relève toi. Allez. »

Le garçon entendait quelques rires étouffés provenant de l'arbre où les autres élèves avaient coutume d'observer ses leçons et le sentiment de colère emplie de honte qui l'emplit manque de peu de le pousser à quitter le terrain d'entraînement. Mais le maître n'était pas sourd et Arkaï l'entendit annoncer avec sévérité,

« Tsaya, demain à l'aube, je t'attendais ici même. Nous travaillerons ta posture, au dessus de quelques charbons ardents, puisque celle de ton camarade te faire tant rire. »

Aussitôt les ramures de l'arbre bruissèrent et des silhouettes en jaillirent, qui s'éclipsèrent aussitôt. Arkaï trouvait, lui, peu de consolation dans la punition infligée à ses moqueurs. Il s'en voulait de leur avoir offert un tel spectacle. C'est alors que le maître se pencha sur lui, en lui tendant un bout d'étoffe pour qu'il essuie la boue de ses cheveux. Le garçon accepta humblement, en hochant lentement de la tête comme il avait appris à le faire ici. Son professeur ramassa son sabre tombé au sol et déclara, l'air de rien,

« Malin, de tenter de profiter de ma faiblesse. »

Prenant conscience de l'audace qui s'était emparé de lui en essayant pareil coup bas, Arkaï baissa le menton et répondit, penaud,

« Je suis désolé, maître. »

« Désolé ? Ne sois jamais désolé d'avoir des idées nouvelles. Sois Désolé de ne pas être allé au bout. » Et devant la mine surprise de son élève, il poursuivit, « D'ailleurs... Pourquoi ta tentative a-t-elle échouée, selon toi ? »

« Vous m'avez surpris en plein assaut. »

« Et tu en déduis que... ? »

« Vous m'aviez vu venir. »

« Exact. Sais tu pourquoi ? »

L'élève prit quelques instants pour réfléchir à sa réponse, et finalement, il osa,

« Parce qu'on vous l'a déjà fait ? »

Shingen lui décocha un de ses rares sourires et l'aida à se relever. La force qu'il pouvait déployer ne manquait jamais de surprendre Arkaï. Il dominait déjà le vieil homme de plusieurs pouces, malgré son jeune âge, mais le temps semblait n'avoir en rien affaibli le Sheikah. Celui ci lui remis son sabre de bois dans les mains et se remit en garde en lançant, presque bravache,

« Leçon du jour : l'expérience. Quand tu tombe sur un combattant plus éprouvé que toi, tu as un désavantage... Et vu ton âge, ça sera souvent le cas. Sauf si tu t'en sers contre lui. Essaye. »

C'était bien là sa manière de faire : Le sujet de chaque entraînement n'était jamais fixé à l'avance, il se révélait de lui même au fil des passes. Mais à présent que le problème était posé, à l'élève de trouver la solution. Resserrant sa prise sur la poignée de son arme, Arkaï passa le plus vite possible en revue les possibilités qui s'offraient à lui. Lorsqu'il fut près, il salua, et passa aussitôt à l'attaque.

Le maître possédait la connaissance de toutes les gardes, de toutes les postures, de toutes les armes habituelles. Mais comme n'importe qui, certaines avaient sa préférence. Il préférait toujours garder son genou fort, l'autre en retrait, avec son sabre en avant, deux doigts souples sur la garde afin de pouvoir parer à toutes les situations rapidement. Arkaï l'avait vu, sans que son maître ne s'en soit rendu compte. Il en était persuadé.

Vif et léger, le garçon bondit sur sa droite, feignant un assaut frontal sur la garde du maître, mais une fois son pied avant enfoncé dans la boue, il se fendit brusquement en direction du point faible de son adversaire. A cet instant précis, il perçut plus qu'il ne vit l'arme de ce dernier s'abattre en direction de son bras. Alors, il tordit violemment son pied d'appui et tourna sur lui même... Pour retomber sur le flanc fort du maître. Profitant de son élan et de la surprise de celui ci, il frappa violemment sur son sabre, tentant de briser sa garde. Une fois, deux fois... Quand soudain le monde sembla s'effondrer sous lui. Il se vit lentement tomber en arrière alors que la jambe du maître venait le faucher sur l'arrière de sa cheville.

Il s'effondra d'un bloc sur le sol, sonné et encore surpris de l'issue du combat. Après un moment de sidération, Arkaï se maudit à nouveau, lançant son arme au loin. La bouche emplie du goût de cendre de la frustration, il soupira, profondément las. Pourtant, l'espace d'un instant, il lui avait bien semblé lire dans le regard du maître un sentiment de surprise, et de vulnérabilité. Comme une fissure dans la carapace indestructible d'une tortue.

« Assez pour aujourd'hui. »

Se redressant en position assise, l'élève joignit les mains en signe de respect comme on lui avait appris et s'empressa de déclarer, d'une voix lourde,

« Je suis profondément désolé. »

Pour toute réponse, il vit une main approcher lentement. Alors qu'il pensait que Shingen l'aidait à se relever, il prit soudainement une claque sur l'arrière du crâne. D'avantage surpris qu'endolori par le coup, il se releva, décontenancé. Une fois sur ses deux pieds, le maître lui remis son sabre à la ceinture tout en lui expliquant, d'une voix calme,

« Cesse de t'excuser à tord et à travers, c'est agaçant. Tu as réussi l'exercice, Arkaï. Non seulement tu as su jouer sur mon expérience accumulée depuis des années, mais tu as presque réussi à me surprendre en utilisant contre moi ma propre consigne. Tu as très efficacement feinté pour déjouer ma vigilance, comme une balle qu'on fait rebondir sur un arbre pour mieux tromper l'oeil de l'animal que l'on chasse. A la nuance près que... » Il posa un doigt sur son front en affichant un sourire de vieux singe, « … Je ne suis pas un lapereau né de la dernière pluie. »

Le garçon sourit, et salua sans se départir de sa bonne humeur. Au final, cet échec ressemblait beaucoup à tous ceux des jours et des semaines précédentes ; Il ne vainquait jamais vraiment, mais il y gagnait toujours en enseignement. Et tandis qu'ils se dirigeaient ensemble vers les bâtiments du monastère, Arkaï darda sur son maître un regard où se mêlaient le respect et l'ambition. Il sut qu'un jour, il goûterait au nectar de la victoire.






Deuxième leçon
Le cœur d'un poing




« Mais cesse donc de penser à ce steak ! »

Arkaï secoua la tête tandis que son ventre grondait de plus belle. Il se maudit mille fois d'avoir à nouveau laissé son esprit s'évader jusqu'à un souvenir de nourriture. La simple vision de quelques chèvres passant tranquillement en contrebas de la falaise y avait suffit. Après deux jours et deux nuits de jeûne, le garçon éprouvait les plus grandes difficultés à faire taire son estomac. De toutes les épreuves et corvées qu'on lui imposait régulièrement, celle là était la plus rude.

Avant, au dehors, il avait parfois faim, souvent même, lorsque l'hiver venait. Mais il finissait toujours par trouver quelque chose : un fruit, un rongeur, des racines s'il le fallait. Et ce temps passé à avoir faim, il l'utilisait à chercher le moyen de se rassasier. Au monastère, alors que les cuisines étaient pleines et les vergers au alentours en pleine saison de récolte, on lui interdisait de se nourrir. C'était quelque chose de subir la vie au grand air, et une autre de se laisser imposer une faim inutile.

« Le guerrier doit savoir se maîtriser, qu'importe les besoins que son corps cherche à lui imposer. » avait dit le maître. Un peu facile, pensa Arkaï, quand ce sont les autres qui doivent encaisser l'épreuve.

Du coup, chacun s'occupait comme il le pouvait, pour tromper le manque, se vider l'esprit. Certains dormaient autant qu'ils le pouvaient, mais Arkaï dormait mal. D'autres se plongeaient dans une activité comme la musique, mais il ne jouait de rien. Lui, avait décidé de ne ménager aucun effort. Du coucher jusqu'à la moitié de la nuit, le garçon oubliait la faim en s'infligeant une autre épreuve ; le froid.

Il était venu, avec les premiers jours d'automne. Les vents glacés avaient dévalé du haut de la Montagne de Lanelle, dans la vallée en contrebas puis sur les collines. C'était un froid surprenant, nouveau pour lui ; une brise gelée et humide, venue de la mer. Pas le voile sec qui tombait sur l'ouest d'Hyrule depuis ses hautes montagnes. Il n'aimait pas ce froid, qui perçait les vêtements et mordait la peau, et donc, il l'affrontait avec d'autant plus de hargne. Si le maître insistait autant, ça ne pouvait qu'être important pour la formation. En élève appliqué, il allait chaque nuit s'asseoir à l'ombre d'un cerisier, perché au sommet d'une falaise. Là, il se laissait attaquer par le vent et la faim avec espoir qu'une leçon importante lui vienne à l'esprit. Mais sur la fine pelisse qui lui servait de couverture, Arkaï se sentait d'avantage affamé et frigorifié qu'enhardi par l'épreuve.

« Je me demande si je vais passer la nuit. »

« Très clairvoyant. »

La voix derrière lui glaça le sang du garçon. On n'oublie jamais la voix de ceux qui ont voulu votre mort. Lentement, Arkaï se retourna pour se retrouver face à face avec Horej, le Sheikah qui, plusieurs mois auparavant, avait tenté de convaincre le conseil de l'éliminer, après l'avoir dépeint comme un démon mangeur d'enfants. Le gérudo se releva lentement, conscient que rien de tout cela n'était normal, même pour les Sheikahs. Le monastère et ses alentours ne recevaient que rarement de la visite du village, encore moins la nuit tombée. Il s'efforçait de rester calme mais déjà, il sentait que son sang bouillait... De colère, ou de peur, il n'aurait su le dire.

« Alors, on s'essaie aux petits leçons de Shingen ? »

Horej s'était penché vers lui, son haleine puait l'alcool. Le dédain se sentait dans sa voix. De toute manière, il était de notoriété publique que les deux hommes se haïssaient... Ou, plus exactement, que Shingen méprisait Horej, et que ce dernier le détestait en retour.

« Maître Shingen. » le rectifia le garçon avec le même mépris dans la voix.

Le Sheikah se redressa, sous l'outrage. Il ne desserrait pas les dents. Sa réponse fut presque inaudible, tant sa voix rauque semblait cassée par la colère et la boisson.

« Tu ose. Encore une fois... T'aime ça hein ?! »

Il empoigna Arkaï par le col de sa tunique. Choqué d'indignation, celui ci n'eut pas un geste de protestation, tandis que l'autre commençait à lui hurler dessus,

« Ca te suffit pas, de m'humilier en plein conseil ! Y faut en plus que t'en rajoute ! Que tu fasse les yeux doux à Shingen ! Que tu le manipule pour qu'il témoigne en ta faveur ! J'en ai marre de toi ! Depuis que t'es au monastère, ils commencent tous à t'accepter ! Pas moi. Moi je vois clair dans ton jeu, kusoyarô ! »

« Lâche moi. » trancha brusquement Arkaï, qui atteignait la lie de ce qu'il pouvait accepter sans créer d'incident. Horej eut alors une lueur malsaine dans le regard et poussa brusquement le garçon vers le précipice en lui criant,

« A vos ordres, majesté ! »

Arkaï ne dut sa survie qu'à son ultime réflexe de s'accrocher à une branche pendue au dessus du vide. En proie à un profond choc devant l'acte du Sheikah, il se ressaisit quand une rafale de vent emporta sa cape. D'un rapide coup d'oeil par dessus son épaule, il vit Horej tirer sa dague et s'approcher. Se balançant sur la branche, il profita de son élan et sauta sur la terre ferme, évitant de justesse la lame qui le frôla dans le dos. Courant à toute allure, le garçon ne se retourna qu'une fois sûre d'être assez loin du bord. Alors, il demanda, la voix tranchante, en dialecte cérémonial Sheikah,

« Est-ce ainsi ? »

A la formule rituelle, Horej répondit par le silence mais sa posture de duel ne laissait aucun doute sur la réponse. Arkaï sut alors qu'il n'avait que deux choix : fuir ou vaincre. La raison lui intimait le premier choix. S'il atteignait l'enceinte du monastère, Horej, même ivre, n'oserait jamais se confronter au maître. Mais au fond de lui, quelque chose l'en empêchait. Il n'avait que trop fui, et le Sheikah venait de lui prouver qu'il avait la rancune trop tenace. Pourrait il sortir une nuit sans avoir peur d'un coup de couteau dans le dos, s'il fuyait maintenant ?

Arkaï expira profondément et se mit en garde. Il réglerait ce problème, cette nuit.

Horej était bien plus grand que lui, plus fort aussi, mais l'alcool ne lui rendait pas service. Lorsqu'il courut sur le garçon, il eut plus l'air d'un taureau que d'une panthère. Mais il avait une arme, à l'inverse d'Arkaï, et une rage trop longtemps contenue. D'abord confiant, le garçon manqua de se faire embrocher plusieurs fois avant de prendre un peu de distance, prudemment.

Son agresseur jubilait, trop pour que ça soit sain. Il semblait même prendre un plaisir certain à le tourmenter. S'approchant lentement, il faisait passer sa lame d'une main à l'autre avec une délectation de fauve rodant autour de sa proie. Puis, convaincu de sa vitesse, il bondit, le bras en avant. Arkaï saisit l'occasion et plongea sur le côté, envoyant un violent coup de pied dans le flanc de l'ivrogne. Mais là où un adversaire sobre aurait accusé le coup, Horej encaissa largement et frappa aussitôt, entaillant profondément l'épaule du garçon. Ce dernier s'écarta, le souffle rendu court par la douleur. Il s'efforçait de se relever lorsqu'il entendit derrière lui la même voix aux accents sadiques s'approcher,

« Je me demande ce que je vais trouver, une fois que je t'aurai ouvert en deux. Un cœur noir, peut-être. Ils seront bien obligés de me croire, avec cette preuve. Personne pourra nier que t'étais un démon ! »

« Ta gueule ! »

Horej était allé plus loin que le garçon ne pouvait le supporter. Arkaï se jeta brusquement sur lui, sans y réfléchir ni prévenir. Fauchant son adversaire aux genoux, il le fit lourdement chuter sur lui. S'engagea alors, au sol, entre les deux combattants maladroitement enchevêtrés, la mêlée la moins digne et disciplinée que ce monastère ait vu depuis longtemps. Rendus ivres de colère pour l'un, et de saké pour l'autre, les deux se frappaient rageusement, sans égard pour leur propre sûreté. Arkaï finit par ne même plus sentir les coups. La privation, les longs mois de rigueur, les souffrances liées à sa nouvelle vie, tout cela tourbillonnait pour donner à ses poings une force qu'il ne leur connaissait pas. Mais Horej avait pour lui l'énergie de l'humilié, et la force de l'âge. Il l'envoya valser d'un violent uppercut dans la mâchoire.

En relevant la tête du sol, le garçon réalisa qu'il était tombé tout près du bord de la falaise. Le choc l'avait brusquement dessaoulé de sa colère, tandis que Horej arrivait vers lui en titubant. Arkaï se releva douloureusement et écarta alors les bras, en déclarant.

« Tu me veux ? Viens me chercher. »

Le prévisible se produisit.

Horej enragea devant la provocation et chargea, comme un taureau rendu fou. Au dernier moment, Arkaï s'écarta et le Sheikah bascula dans le vide... Mais au dernier instant, le garçon lui attrapa le bras et l'envoya percuter l'arbre. Seul le couteau disparut en contrebas. Horej désarçonné, Arkaï lui saisit le col et lui ordonna, d'un ton qui aurait pétrifié un vrai taureau,

« Retourne vite au village et ne reviens plus jamais. Sinon, tu finiras là où tu aurais été si je n'en avais pas décidé autrement. Vas ! »

Hébété, Horej s'en alla benoîtement comme un enfant grondé par ses parents. Pourtant, le garçon attendit qu'il ait disparut derrière la colline pour s'affaisser d'un coup sur le sol. Il tremblait de tout son être et le froid le mordait deux fois plus rudement qu'avant, du moins lui semblait il. Arkaï ignorait d'où il avait tiré cette autorité capable de faire dessaouler son adversaire, il ne s'était pas reconnu lui même en prononçant ces mots... Et pourtant.

Il en était encore à essayer de mettre de l'ordre dans ses idées en grelottant lorsqu'il sentit un voile chaud entourer ses épaules. Il releva les yeux et vit que son maître se tenait derrière lui. Brusquement conscient qu'il n'allait pas pouvoir cacher l'événement, le garçon baissa la tête de honte et demanda, honteux,

« Depuis combien de temps êtes vous... ? »

« Assez longtemps. »

« … Que... Que pensez vous qu'il va se passer ? »

Shingen s'assit à ses côtés et lâcha un petit rire, sardonique.

« Je dirais que Horej va se réveiller avec des bleus et une sacrée entorse à sa fierté demain, mais qu'il n'osera rien dire de peur de s'attirer à nouveau les moqueries de tous. » Il essuya le sang qui perlait de la blessure à l'épaule de son élève. « Quand à toi, tu auras un bandage pour quelques jours. Calme toi donc, Arkaï, la faute ne te reviens pas. Tu m'as même impressionné, en sauvant cet idiot d'un trépas dont il aurait été seul responsable. »

« Vous n'étiez pas prêt à le sauver ? »

Le maître regarda vers la falaise un long instant avant de répondre, sèchement,

« Pas de lui même. Je t'aurai empêché de le tuer, mais je ne suis pas responsable de lui. Ce qui est voué au trépas doit mourir, mon garçon. Autrement, la vie ne fonctionne plus. Néanmoins... » Il prit la main meurtrie d'Arkaï dans la sienne, « … Tu auras à prendre cette décision, lorsque tu seras un guerrier. A celui qui possède la force, revient le droit de vie et de mort. Mais l'enragé qui tue parce qu'il le peut vaut moins qu'une bête. La véritable force, Arkaï, se révèle dans la générosité avec laquelle on en use. Protège l'innocent, épargne le jeune et le faible, mesure toi au puissant, et tu rivaliseras avec les géants. »

Sur le chemin du retour, le garçon gravait une fois de plus les paroles du maître dans sa mémoire. Mais, au fond de lui, une petite voix dérangeait sa tranquillité retrouvée. Une voix qui instillait en lui un doute lié à cette leçon trop parfaite ; Horej était venu entièrement par lui même... Ou bien quelqu'un lui avait il mis une bouteille entre les mains ? Au moment de quitter Shingen pour aller se reposer, Arkaï ne put s'empêcher de trouver le sourire de son maître un peu trop ironique, et son attitude un peu trop sereine.



Troisième leçon
Un visage du monde





Ce matin là, il s'était réveillé avant le lever du soleil, aidé en cela par la pluie qui tombait lourdement sur le toit du dortoir. Le concert de gouttes frappant le bois avait troublé son rêve parfaitement silencieux, et ses yeux s'étaient ouverts d'eux-mêmes.

Constatant que ses condisciples ne l'avaient pas précédé hors du royaume des songes, Arkaï se vêtit d'une simple tunique et se dirigea vers la partie du bâtiment qui ouvrait sur la cour. Ayant chapardé une pomme fraîche au passage, il s'assit négligemment sur le sol, en dessous du portail et savoura son moment de calme et de tranquillité, bercé par le concerto de la pluie qui tombait au dessus de lui, coulait en fin filet d'eau devant lui et formait lac et rivières miniatures sur la terre battue, avant de dévaler plus bas, vers l'entrée du monastère.

Devant ce spectacle, quelque chose vibrait étrangement en lui. Comme l'impression inquiétante d'avoir oublié un détail important, ou de manquer un élément crucial du tableau en face de lui. Il croqua dans la pomme, en apprécia la saveur, et le goût sucré. Cela l'emmena loin en arrière, dans ce qui fut un jour son foyer ; une colline, abritant une étroite grotte, à peine digne d'un loup, mais qui l'abritait du reste du monde. Et devant, un grand pommier sauvage. Ses fruits étaient les derniers réconforts que le garçon pouvait espérer avant l'arrivée de l'hiver, et son empreinte mortelle. La pluie et la pomme annonçaient des temps de faim et de froid


C'est alors qu'il comprit ce qui lui échappait : Il avait perdu la notion du temps.

Quand les Sheikahs l'avaient envoyé au monastère, Arkaï ne s'était plié à leurs ordres qu'avec la ferme intention de déguerpir dés qu'ils lui en auraient laissé la première occasion. Et il l'avait fait... Avant de revenir, un peu malgré lui, sans trop savoir pourquoi. Il s'était laissé amadouer par la nourriture en abondance bien que rationnée, par le lit qu'on lui avait donné, par le toit qui l'abritait chaque nuit, par la routine confortable d'une instruction certes stricte mais infiniment moins dangereuse que la vie au dehors... Néanmoins, pendant toutes ces saisons, il n'avait jamais perdu de vue son horizon : Partir, quitter ce lieu et retrouver les routes et les collines, toujours nouvelles. Du moins, c'était ce qu'il croyait. Ce matin là, le garçon prit brusquement conscience qu'il ne pensait plus à son départ. Depuis quand ? Il n'aurait su se le dire. C'était peut être à cause de la fête des ancêtres, quelques semaines auparavant ? Ou depuis les soirées passées avec les autres élèves les pieds dans l'eau des rizières pour se soulager des récoltes sous le soleil brûlant de l'été dernier ? Plus il y pensait, moins Arkaï ne trouvait de point de repère auquel se raccrocher. Il avait juste cessé d'y penser, à mesure qu'il s'habituait à cette vie. Une question le frappa alors : Etait il encore le garçon sauvage, qui appartenait au dehors, ou avait il changé à l'instant même où il avait franchi ce seuil ?


Il se perdait dans les méandres de son propre questionnement quand il entendit le bruit d'un tissu qui se froisse derrière lui. Le maître l'avait imité, bien qu'en adoptant une posture plus digne, et l'observait avec un air amusé.

« M... Maître. » salua le garçon avec nervosité tout en rectifiant son attitude négligée. Mais son maître ne semblait pas contrarié le moins du monde. Il leva une main en signe d'apaisement et son élève s'autorisa à se détendre.


« Je ne voulais pas t'interrompre dans ta méditation, Arkaï. »

« … A vrai dire, je n'étais pas bien avancé, maître Shingen. » Balbutia-t-il pour tenter de camoufler son inconséquence.


Le vieil homme n'eut certainement aucun mal à déceler le trouble du garçon. C'était un fait établi que lui mentir était à peu près aussi utile que d'espérer se cacher d'un singe en pleine forêt ; il lui suffisait généralement d'un regard pour percer l'armure de votre âme et y lire les secrets qui y étaient cachés. Cependant, cela ne signifiait pas qu'il le faisait nécessairement. Shingen Ashina n'agissait jamais sans raison, quand bien même il était seul à les connaître. Affichant une de ses expressions indéchiffrables, qui aurait pu aussi bien signifier un grand amusement qu'un profond agacement, il se leva et demanda au garçon,


« Suis moi, il est temps pour ta leçon. »


Les deux suivirent le portail jusqu'à une de ses extrémités puis le maître ouvrit l'une des portes du monastère, qui donnait sur un chemin discret vers la forêt. A mesure qu'ils descendaient d'un pas sûr et habitué le sentier, la pluie commença à faiblir et les nuages lourds furent portés par le vent vers l'Ouest, le village, puis vers la plaine à perte de vue. Le paysage encore frémissant des vagues tombées du ciel avait un charme renversant, mais Arkaï ne parvenait pas à l'apprécier. Le maître avait certes des lubies, mais il ne l'avait que rarement emmené hors des murs, et jamais avant que la cloche du temple n'ait annoncé le début de la journée. Son geste était complètement neuf, et donc, inquiétant, et grisant.

Lorsqu'ils furent arrivés en bas du sentier, Shingen tira de sa ceinture les deux sabres de bois qui y étaient rangés et en tendit un à son élève. Il prit le sien négligemment, sans adopter de garde et continua sa marche tout en expliquant,


« Au cours de notre marche, je vais te frapper, au hasard, sans prévenir. A toi de te défendre, mais seulement au moment précis du coup. »


Arkaï resta un instant interloqué par cette consigne d'exercice. Il était censé accompagner son agresseur, lui présenter son flanc, ne rien faire, jusqu'à ce qu'il se fasse attaquer ? Le maître cherchait il à lui apprendre l'inconscience ? Cependant, il ne protesta pas. C'était aussi inutile que déplacé ; la leçon s'imposerait naturellement à lui plus tard. Le garçon avait pris l'habitude de ne pas comprendre immédiatement. Il régla donc ses pas dans ceux de son maître tandis qu'ils empruntaient l'un des sentiers de la forêt secrète, en silence.

Le regard aux aguets, les muscles tendus, Arkaï se préparait du mieux qu'il pouvait à une agression qui ne venait pas. Shingen semblait totalement absorbé par la nature autour de lui ; une grenouille traversant leur chemin devant eux, une branche secouée par le vent, le chant d'un oiseau matinal... Il semblait presque avoir oublié son propre exercice. Son élève se laissa absorber un instant par la mélodie d'un ruisseau non loin, jusqu'à ce qu'il sente un choc dans son dos. Le maître sourit, et ramena son sabre devant lui, l'air de rien.


Vexé comme un poux de s'être laissé surprendre, le garçon redoubla d'attention, prit garde à ne pas se laisser distraire. Son poing serré sur la garde du sabre, les bras tendus, il attendit le moindre mouvement suspect. Et celui ci vint, trop vite. En une fraction de seconde, le sabre du maître le touchait à l'épaule. Quelques pas plus loin, c'était à la jambe. Puis, à l'occasion de la traversée d'un pont, sur la tête. Arkaï enrageait devant ce qu'il commençait à considérer comme une humiliation gratuite. Le maître était plus rapide que lui, tous deux le savaient bien. Alors pourquoi ? Gardant son calme malgré les coups qui continuaient à pleuvoir, il reprit dans son esprit les mots utilisés par Shingen. Il allait le « frapper au hasard, sans prévenir »... Au hasard.

L'évidence le frappa plus fort que le sabre de son maître ; Le hasard n'existait pas, c'était une invention humaine pour décrire ce qu'on ne pouvait pleinement comprendre. De fait, le rythme des coups était trop surprenant pour qu'ils soient dû au simple bon vouloir du maître. Même un épéiste confirmé finit toujours par se répéter. Il y avait donc un rythme à comprendre, à capter. Arkaï laissa le sabre s'abattre plusieurs fois, tâchant de repérer un motif, de l'associer à une mélodie qu'il aurait entendu au monastère, un air que le maître devait connaître par cœur. Il essaya avec les chants des fêtes traditionnelles, avec les prières du temple, avec ce que Shingen sifflait parfois au bain.


En vain.
Et puis, alors qu'il était à court d'idées et que les bruits de la forêt s'imposaient à ses oreilles, il entendit une goutte tomber d'une feuille sur son épaule. Au même instant, le sabre le frappait. Puis une autre, suivie par une troisième, et une quatrième. Là, le sabre frappa à nouveau. Convaincu de tenir quelque chose, Arkaï laissa le motif passer encore une fois, deux fois. Et lorsque la quatrième goutte tombait pour la troisième fois, il leva son sabre et dévia brusquement le coup.

Ce qu'il vit sur le visage de Shingen lui resta longtemps en mémoire. Au lieu de son habituel rictus plissé énigmatique, le vieux maître affichait un large sourire et ses yeux brillaient de fierté.


« Tu vois... » dit il d'une voix douce, « Tu es plus doué pour la contemplation que tu ne le croyais. »

Et sans que le garçon n'ait pu répondre, il poursuivit sa marche sur le sentier. Arkaï suivit sans trop savoir quoi dire, de toute manière. Les pas du maître les firent quitter la forêt et reprendre la direction des sommets. Mais au moment où ils auraient dû emprunter la voie du monastère, Shingen choisit de suivre la trace d'un vieux chemin qui serpentait plus loin, entre les falaises. Peu rassuré de se retrouver si haut et à la merci d'un éboulement, l'élève tâcha de ne pas perdre son maître qui ne semblait pas, lui, affecté le moins du monde.
Après presque une heure de marche louvoyante et périlleuse, le chemin laissa place aux herbes folles, sans que cela ne freine le moins du monde Shingen, qui avançait toujours en silence, le regard perdu au loin. Puis, petit à petit, Arkaï aperçu des indices sur leur destination. Une petite statue ébréchée. Un amas de jouets d'enfants en offrandes en dessous d'un amas de pierre. Une gravure peinte sur un rocher. Finalement, comme il avait fini par le deviner, ils arrivèrent à un sanctuaire. Un petit temple de bois peint, abrité entre plusieurs lames de roc jaillissant du sol, comme coupé du monde. On n'y tenait sans doute pas à plus de dix, mais il s'en dégageait une aura étrange, mystérieuse, opaque. Le maître s'arrêta alors, attendit que son élève le rejoigne et posa une main sur son épaule.


« La contemplation du monde est une des clés de la sagesse. Mais il te faut comprendre aussi la valeur de la contemplation intérieure. Viens. »

Soudain impressionné par le sujet d'une telle leçon, Arkaï aurait renâclé à avancer si Shingen ne l'avait pas poussé à le faire. La porte du petit temple était ouverte et ils entrèrent sans difficulté. A l'intérieur, le sanctuaire ressemblait à celui du monastère, dans sa simplicité. Les murs de bois étaient couverts de figures peintes ; dieux, héros, monstres en tous genres. Au fond, sur un autel de planches, semblait brûler éternellement un bâton d'encens. Au milieu de la pièce trônait une petite statue de la déesse, semblable à toutes les autres. Rien de tout cela ne lui était inconnu... Excepté un détail. Du plafond pendait au bout de fils des dizaines de miroirs de bronze. Un rayon du soleil se frayait un chemin à travers les rochers et le toit pour frapper l'un d'entre eux, qui renvoyait la lumière à travers tous les autres. Le spectacle était magnifique, flamboyant de toutes les couleurs.
Après une courte prière devant la statue, le maître se rendit devant un miroir et s'observa longuement dedans. Il posa alors son front dessus et le lâcha. Ensuite, il en sortit un autre de son vêtement et le tendit à Arkaï. Lorsque ce dernier le reçut, Shingen prit sa main entre les siennes et lui expliqua, d'une voix qui essayait de ne pas trahir son émotion,

« Il est à toi. Tu es ici depuis maintenant 3 ans. Tu semble enfin avoir trouvé ta place. Tu as mérité de regarder le visage de la divinité, les yeux dans les yeux. »

Confronté à une tempête intérieure d'émotions contraires, Arkaï tâcha de se contenir du mieux qu'il pouvait alors que les larmes lui montaient aux yeux. Expirant difficilement, la gorge nouée, il remercia son maître du mieux qu'il put, se baissant jusqu'à presque toucher la surface du bronze. Puis, encouragé par Shingen, il se regarda dans le miroir.
La vision de son visage brun, les larmes dans ses yeux, la couleur de ses cheveux. Tout cela réveilla en lui un fardeau enfouit depuis trop longtemps, que son émotion ne fit que décupler. Envahit par une peur, sourde, animale, violente, il lâcha l'objet et s'enfuit, à toute allure, hors du sanctuaire. Ses jambes semblaient le propulser à la manière d'un lièvre poursuivit par un oiseau de proie. Il ne pouvait plus penser, plus s'arrêter. Pris au piège d'une souffrance qui avait jailli comme un volcan, Arkaï courut, jusqu'à trébucher au milieu des herbes folles. Alors, s'effondrant de tout son long, il fut incapable de se relever.

Lorsque son maître le retrouva, quelques minutes après, le garçon était assis, livide, les yeux rouges et secs d'avoir trop pleurés, et il tremblait de tout son long. Shingen ne dit rien, ne fit rien, si ce n'est s'asseoir à son côté, et lorsque ses pleurs reprirent, lui offrir une épaule sur laquelle se pencher.
Ils restèrent là une partie de la journée, sans rien dire, à contempler l'horizon. Arkaï n'osait parler, même pour s'excuser. Il craignait d'avoir commis un sacrilège, ou pire, d'avoir déçu son maître. Ce dernier l'observait du coin de l'oeil mais ne montrait rien qui s'apparentait à de la colère. Il semblait d'avantage... triste, qu'outré.

Quand la tempête fut passée dans le cœur du garçon, et qu'il eut retrouvé la parole, il déclara, d'une voix rauque,

« Je suis désolé. Je ne sais pas ce qui m'a pris. »
Shingen passa son bras autour de son épaule et lui répondit,
« C'est moi qui te doit des excuses. Par orgueil, j'ai cru que quelques années ici pouvaient effacer ce que tu as vécu, ce que tu étais en franchissant ma porte. Je me suis trompé... »
« Non, vous aviez raison ! » s'écria Arkaï en se redressant brusquement, « Je suis votre élève, rien de plus ! Je n'ai d'autre foyer que chez vous ! Ma vie est ici ! »
Ses yeux brûlaient d'une affection mêlée de peur. Rien ne l'effrayait plus en ce instant que d'être éjecté du monastère à cause de son échec. Le maître soutint longuement son regard, lui sourit, puis déclara,
« Rien n'est jamais écrit, mais j'aime te l'entendre dire, seito. »

Les mots de Shingen aurait dû le rassurer, mais au fond de lui, Arkaï sentit que son maître lui cachait quelque chose. Lorsqu'ils reprirent la route pour rentrer au monastère, celui ci ne marchait plus un pas devant mais strictement à ses côtés. Comme si cette journée les avait rapprochés, mais d'une façon qui inquiétait le garçon. Après tout, que devient un élève, lorsqu'il cesse de l'être ?
Ils venaient à peine d'arriver quand, au moment de passer la porte du monastère, Shingen le retint et lui demanda,

« As tu compris le sens des miroirs ? »
« Je le crois. Le reflet de l'âme pure est le visage de la divinité. »
« Comprends-tu pourquoi tu n'as pas pu regarder ? »
Au vu de l'expression inquiète du maître, Arkaï compris que sa réponse était cruciale. Il y réfléchit donc quelques instants avant de finalement oser répondre,
« Parce que je n'étais pas prêt à soutenir cette vision ? ... Parce que j'étais impur ? »
Shingen nia de la tête. Il se pencha légèrement pour être à la même hauteur que son élève et le fixer droit dans les yeux.
« Enlève toi ces idées de pureté du crâne. Regarder dans le miroir signifie être en paix avec soi-même. Et pour cela, être en harmonie avec l'univers. Je pensais que tu y étais arrivé car je ne voyais en toi que l'enfant sauvage que j'avais ramené sur le chemin de l'Humanité... Mais il y a plus en toi, Arkaï. Bien plus... »
« Quoi donc ? Qu'y-a-il en moi ? Qui suis je, à la fin ?! »

Le garçon avait presque crié, tant il en avait assez de ces questions qu'il se posait et que d'autres se posaient à propos de lui. Tous ceux qui croisaient son chemin se passionnaient pour lui, alors qu'il s'en serait bien passé ! Tout son corps tremblait de rage contre cette situation injuste. Shingen, lui, passa calmement une main dans ses cheveux en lui souriant tristement,

« Je l'ignore. Certains au village croient comprendre mais ce sont des idiots. La vérité, c'est que personne ne possède la réponse à cette question... en dehors de toi même. Seul toi pourra la trouver. »
« Vous serez là pour m'y aider ? »
« Autant que je le pourrais, seito. Autant que je le pourrais... » dit il, en poussant la porte du monastère.

Tandis qu'il passait le seuil de son foyer, Arkaï songea qu'une fois de plus, ces mots ne suffiraient pas à l'apaiser pleinement. Après une journée pareille, il lui semblait que quelque chose s'était brisé, irrémédiablement. Comme si le gong avait sonné pour annoncer que son destin l'avait rattrapé.


Ses compétences


Son inventaire

Dague Sheikah

Un tantō Sheikah dans la plus pure tradition du village, quoique luxueusement décoré sur la poignée et le fourreau. La lame est courte ; à peine deux fois la longueur d'une main étendue, mais son fil est tranchant comme un rasoir. C'est une arme de poing, qui ne se substituera pas à une véritable épée, mais peut s'avérer redoutable entre des mains expertes. Les sculptures sur l'ivoire sont anciennes et représentent des scènes mythologiques de dieux et de démons oubliés.

Arc Sheikah

Un simple arc long Sheikah composite, association de bambou, de bois de frêne et de lanières de cuir. Sa poignée est située légèrement en dessous de son milieu, donnant de l'amplitude à sa partie supérieure. Souple, il n'en est pas moins voué au combat à distance ; ses flèches peuvent parcourir plusieurs centaines de pieds avant de faiblir. Au corps à corps, il devient parfaitement inutile. Sur le bois sont soigneusement gravés des symboles Sheikahs.


Sa ligne du temps


Commentaires

Bonsoir, mon enfant. M'en voudrais-tu si je profite, l'espace d'un instant, de la chaleur de ton feu de camp ? Le vent secoue mes vieux os comme autant de branches fatiguées par le temps.

Ainsi, semble-t-il, les portes des Landes s'ouvrent à toi. Puisse la lumière de la Mère illuminer ta route, te prémunir du doute et te protéger dans l'obscurité.

Pour te remercier de ta mansuétude, permets-moi de te donner un conseil avant de reprendre mon chemin. Plus que jamais voyager seul est dangereux. Tu ne devrais t'aventurer sur les sentiers qu'une fois armé et accompagné.

Bon vent, mon garçon. Que les Déesses te gardent.
Vieil homme

03/02/2020 23:52

Ton histoire est vraiment cool <3 J'espère que Arkaï apprendra à s'affirmer et à suivre sa propre voie, indépendamment du mauvais oeil des autres !
Samir

22/02/2020 01:13

Petit Arkaï deviendra grand, j'espère voir le plus vite possible comment ce jeune homme va évoluer et ce qu'il va devenir, il y a là une belle base ! Au plaisir de le croiser au détour d'un RP
Béryl

12/08/2020 12:30

De l'homme à la bête, il n'y a qu'un pas. Sauras-tu faire le bon choix ou tu me trouveras sur ton chemin et ce ne sera pas pour partager un verre, cette fois-là !

Très bonne prez, très complète et de quoi pâlir lorsque l'on sait le sort que le Néant a réservé au précédent homme Gerudo.
Kassander

14/08/2020 23:10